CARTON 25 juin-2

A l’invitation de M. Michel Rossi, Maire de Ville de Petrabugno, de l’association Culture et animation, de l’association Musanostra, en présence de Mme Laura Dinelli, le public était invité à participer à la rencontre culturelle orchestrée par Monsieur Francis Beretti

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On  a évoqué la Villa Bella Canzona car M Beretti, chercheur, professeur, avait remarqué qu’à une certaine époque (mi 19 e siècle), elle avait accueilli des personnalités célèbres et variées.

Elle est toujours bien visible sur les hauteurs, au dessus de la villa Ker Maria
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Ancienne  villa   Sainte Marie, baptisée “ Bellacanzona” par Francesco Domenico Guerrazzi , le propriétaire actuel en est M. Comte. C’ est une maison dont l’histoire est reliée à tout un pan de l’activité agricole, commerciale et industrielle de la Corse, depuis l’exportation des cédrats jusqu’à l’exploitation des minerais.
vue sur bastia. tour des minelli au fond
Depuis la moitié du 19e siècle jusqu’à l’entre deux guerres, cette maison , qui a très probablement été construite vers 1840, a été un véritable foyer de culture, un lieu de rencontre de gens notables, non seulement dans le domaine politique, mais aussi et surtout dans le domaine des arts et des lettres.
Elle mérite donc qu’on s’intéresse au riche patrimoine qu’elle représente.
Il y avait près de cette maison une tour, aujourd’hui détruite.
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Son historique a été l’objet d’une rencontre organisée conjointement par Musanostra et la municipalité de Ville di Petrabugno, dans la salle très confortable de la mairie annexe, qui donne sur le port de Toga. Il y eut tout d’abord l’ accueil par M Michel Rossi, maire. A la tribune, mme Bereni Canazzi, présidente de l’association Musanostra, m. le professeur Francis Beretti, organisateur de cette manifestation, m.Kévin Petroni, traducteur et animateur,  Mme Laura Dinelli, conférencière. Devant une salle comble, trois intervenants ont pris tour à tour la parole, avant la séance de questions qui a suivi les exposés : Madame Laura Dinelli, Francis Beretti, Kevin Petroni.
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Laura Dinelli est “Responsable de la fonction des Biens culturels et du système des fortifications” de Livourne . Madame Dinelli est co-auteur d’un ouvrage sur Giovanni Fattori, qui faisait partie des Macchiaioli, artistes en rupture avec le néo-classicisme de leur époque, influencés par Proghon et Gustave Courbet, et considérés comme les initiateurs de la peinture moderne italienne.
Elle a aussi co-dirigé un recueil d’actes de colloques sur Francesco Domenico Guerrazzi.
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Madame Dinelli a fait une conférence bien documentée pour situer le contexte historique de la venue en Corse de Francesco Domenico Guerrazzi, un homme politique de premier plan., et sur le séjour à ville di Petrabugno d’Edith Southwell Colucci et de son mari Guido Colucci.
 


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Guerrazzi
Francesco Domenico Guerrazzi
Guerrazzi fut l’un des principaux meneurs de la rebellion de Livourne contre la domination autrichienne. Républicain, ami de Giuseppe Mazzini, animateur de la Giovane Italia et des Veri Italiani, il n’hésita pas à payer de sa personne, au point de subir l’emprisonnement et l’exil. En 1849, la république est proclamée, le grand-duc Léopold s’enfuit de Florence et le gouvernement est confié à un triumvirat, dont fait partie Guerrazzi; mais en 1853, le grand-duc Léopold II remonte sur le trône, et Guerrazzi est condamné à l’exil.
Il choisit la Corse, où il va retrouver des amis corses comme les banquiers Gregori, Joseph Multedo, les négociants Valery, Le conseiller Salvatore Viale, les Vannucci et la famille de Francesco Maria Nicolao Santelli, consul de Modène et Reggio, et certains réfugiés italiens, comme les artistes Tutici, Maganini, et Giurovich. Il s’installe dans une maison qu’il baptise “Bellacanzona”, parce que le murmure de la mer lui apportait la voix de sa patrie. Parmi ses compatriotes de renom, le peintre et décorateur Carlo Tutici. L’un de ses frères, Luigi, devait retourner en Corse, se maria à Pietralba, et s’installa à Bastia, où il mourut en 1919. Il continua à exercer son métier de peintre dans les églises et les maisons privées de cette ville. Ferdinando Magagnini ébéniste, sculpteur et architecte, exécuta une commande d’Antoine Sébastien Lazarotti, maire de Bastia: la tribune de la cathédrale.
En octobre 1853, Guerrazzi s’installe dans son “ermitage”, très beau, et même divin, parce qu’il voit Monte Cristo, Giglio, Elbe et Capraia, et quand le temps est beau, ce qui est souvent le cas, les rives lointaines de ma bien aimée patrie, et la mer arrive sous la colline où se trouve la maison, de sorte que je peux pécher de mon lit”. La villa était alors la propriété de Jacques Damei. En mars 1854, il écrit: “ J’ai recueilli les rameaux éparpillés de ma petite famille, et de mon entourage, auxquels j’ajoute deux domestiques, deux chèvres et un chat, et une cinquantaine de poules et de pigeons. Je prends des allures du patriarche Noé, ou peu s’en faut”.
Le séjour de Guerrazzi à la villa “Bellacanzona” fut studieux. Le Livournais y composa “L’asino”, satire féroce du système judiciaire toscan, une oeuvre qui connut le succès.

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Après son départ qui eut lieu en octobre 1856, Guerrazzi écrivit à son ami Santelli: “Je n’ai pas oublié la Corse, et pour montrer ma reconnaissance, je confirme mon idée d’écrire quelque chose sur elle”. Il tint parole, et son séjour dans l’île lui inspira en effet quatre ouvrages: La torre di Nonza, la storia di un moscone, Pasquale Paoli ossia la rotta di Pontenuovo, et La vita di Sampiero d’Ornano.
 
 

Statut de Guerrazzi à Livourne

 
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Arthur Castell Southwell

Southwell né à Londres le 15 août 1857. Tout jeune, employé dans l’importante société londonienne de confiserie en tous genres dirigée par son père, la société anonyme Charles Southwell and C° Ltd. Cette firme importait des cédrats corses, pour la confection des plum puddings et des mince pies, friandises classiques des Noëls anglais.
Le marché mondial des cédrats était alors détenu par la Corse et par la Grèce, mais le fruit corse, notamment celui cultivé dans le Cap, considéré comme le meilleur des deux . Par l’intermédiaire d’un ami commun, un négociant de Livourne, le père d’Arthur fit la connaissance du docteur Antoine Piccioni , riche propriétaire terrien, maire de Bastia de 1865 à 1870.
En 1877, Arthur est envoyé en Corse, où il est reçu par Piccioni. Il a l’idée d’organiser des services directs entre Bastia et les ports du continent et de la Grande Bretagne. En 1882, il installe son bureau à Bastia, au nouveau port. Et c’est pendant l’hiver 1883-1884 qu’il s’installe aux Minelli, dans la villa “Secola”, du nom du propriétaire .
En 1884, il fut nommé vice-consul britannique.
L’agence maritime qu’il avait créée se développa , et Bastia fut reliée aux grands ports d’Europe, et même de Tunisie et New York. Les vapeurs chargeaient des cédrats, de l’acide gallique, des minéraux, du bois, du liège, des peaux, etc. et importaient du charbon fossile pour les chemins de fer et la compagnie du gaz, et des fûts pour transporter l’acide gallique. En1885, il est nommé agent de la célèbre compagnie d’assurances , la Lloyd. En 1890, il reprend la concession de la mine d’antimoine de Luri, il négocie l’exportation des minerais de cuivre vers l’Angleterre, et s’occupe d’exploiter la mine de Lozari.
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Passionné de mécanique, mais aussi de minéralogie, il considérait que “la Corse était un vrai musée géologique”. Il connaissait très bien l’île, qu’il avait parcourue en tous les sens, à pied, à cheval, en cabriolet, et en voiture automobile. Il avait une juste vision de l’avenir touristique de la Corse, et tous les gens qui avaient affaire à lui l’appréciaient beaucoup.
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Ses fonctions de vice-consul l’amenaient à entrer en contact avec toutes sortes de visiteurs, et c’est là l’un des intérêts de notre histoire: La villa “Bellacanzona” était un point de rencontre animé, où l’on côtoyait de nombreuses personnalités du monde politique, mondain et scientifique, des alpinistes, des botanistes, des naturalistes, des géologues, des paléontologues, des ornithologues, des archéologues et des écrivains. Des personnalités sympathiques, parfois des originaux.
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Edith Southwell

Le 26 décembre 1888, l’unique fille de Southwell, Edith Stelen, naît dans la villa des Minelli. Elle allait devenir ethnologue,et auteur de contes issus de traditions populaires corses. Dans sa préface au Racconti corsi, publiés à Livourne en 1928, Edith écrit: “ Tout ce que je transcris ici a été recueilli de la bouche des montagnards mêmes. Le paysan corse est un narrateur parfait, sa mémoire est riche de chants et de légendes transmis oralement de génération en génération , répétés à l’infini, soit dans les veillées autour du fucone, soit dans les longues journées d’été quand ont bavarde et qu’on chantonne à l’ombre”.
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Habituée dès sa plus tendre enfance à parcourir l’île dans tous les sens avec son père, elle accompagna le zoologue et paléontologue suisse Charles Immanuel Forsyth Major dans ses tournées de prospection.
L’un des souvenirs les plus vivaces de sa fille: les promenades qu’elle fit sur la petite “ Humber”, “the beloved” (la bien -aimée), la seconde automobile privée de l’île, après celle du commandant Nivelle.
 
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Guido COLUCCI

 

L’ami d’enfance d’Edith, à Bastia, était Guido Colucci, fils d’Enrico, ministre plénipotentiaire d’Italie. Edith et Guido se marièrent en 1914,; ils vécurent jusqu’en 1930 à Florence, puis ils s’installèrent à Rome, où ils moururent, Edith en 1936, et Guido en 1949

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Tous les ans, en été, ils séjournaient dans la villa Bellacanzona.

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La famille Colucci et des amis sur la plage de Toga en 1885
(On peut voir au loin la villa BellaCanzona derriere la tour de Toga en ruine)

 

Les époux Colucci y collectionnent les archives, des documents, des ouvrages sur la Corse, des textes anciens et modernes. Edith y écrivait pour d’importantes revues italiennes, pendant que Guido peignait et réalisait des oeuvres d’art décoratif. Guido était l’élève du Livournais Giovanni Fattori, le principal animateur du célèbre mouvement des Macchialioli toscan, et qui s’est imposé comme le plus importantgraveuritalien du siècle.

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Voyage du president de la république S Carnot en Corse 1890
La foule des grands jours devant la place St Nicolas

En 1924, la villa “Bellacanzona” voit un autre visiteur célèbre, Gino Bottiglioni, l’auteur du monumental Atlante linguistico etnografico italiano della Corsica, dont Colucci illustra les cinq premiers volumes, et qui allait remporter en 1940 le prix royal de philologie et de linguistique. Pour cet Atlante, Colucci réalisa trois tableaux hors texte, Alla Santa di Niolo, La veglia a u vugone, et Il Vòcero.

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Portraits de Guido Colucci
 
 
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Nous avons utilisé pour préparer cette évocation, divers travaux, articles, ou sites internet particulièrement remarquables. Sur le séjour de Guerrazzi, un article d’Ersilio Michele, un article d’Emile Pucci. Sur Arthur Castell Southwell, et les époux Colucci, les notices de Pierre-Jean Campocasso, de Pierre Giansily, le site de Lino Soddu, et sur Guido Colucci, les articles et le site de Silvia Giordani et Fausta Samaritani. Madame Laura Dinelli a fait la synthèse de ces sources, en y ajoutant le fruit de ses propres recherches.
 
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Madame Marie-Pierre Marchini a travaillé sur Southwell avec les
classes du collège Simon Vinciguerra ; nous avons pu apprécier
les livrets et images de cette démarche pédagogique de grande qualité.
 


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