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François de Negroni a le sarcasme incoercible. On est averti dès le début. Il vient de rassembler dans un ouvrage récent des textes et entretiens, encadrés par deux nouvelles, rédigés entre 2014 et 2017, qui sont une série de tirs ciblés visant “les relayeurs à gages du système de domination”, selon le mot d’Isabelle Chazot, les figures à la mode de “l’expert, l’humoriste, le people, l’intellectuel cathodique, le maître-à-vivre,” les exposants arrogants et médiocres d’un prêt-à-penser hégémonique.

La plume acérée du satiriste crève des baudruches idéologiques diverses et variées, telles l’écologisme, le développement personnel, l’antiracisme, l’hygiénisme, l’ethnicisme, le genre, “les auto-entrepreneurs opportunistes, les sorciers cathodiques dont le savoir enjôleur, machine à sous rétribuée à la minute, est en totalité au service d’un enfumage proprement crapuleux”, “petits-bourgeois intellectuels postmarxistes détenteurs de privilèges économiques chèrement défendus. Déjà, au début des années soixante le sociologue Wright Mills avait dénoncé “ ces célébrités professionnelles qui vivent de l’étalage continuel d’elles-mêmes, agissent en censeurs de la moralité publique, en créateurs de la sensibilité de masse”; des prescripteurs d’opinion qui “s’inscrivent en France dans une longue tradition salonnarde”. “La liberté d’expression, dans son acception post-soixantuitarde, devient ainsi le privilège accordé aux bouffons stipendiés de la classe dominante – humoristes, caricaturistes, animateurs – d’humilier à loisir les sans-grades, les modestes, les blaireaux”. Ni l’animateur des “Grosses têtes” sur RTL et “ses grasses saillies”, ni “le nouveau bonimenteur de masse”, d’Europe 1, ne sont épargnés.

Il ne suffit pas d’avoir l’esprit chagrin pour démystifier les enfumeurs; encore faut-il un certain style, comme de la “virtuosité railleuse” et un “sens des formulations assassines” , remarquées par Isabelle Chabot, et saluées par un orfèvre en la matière, Angelo Rinaldi: “enfin un sociologue qui sait écrire!”, écrit le romancier.
La préfacière nous promet “du plaisir et un sursaut d’intelligence” à la lecture de ce recueil.
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François de Negroni, Incoercible, Materia scritta, juin 2017


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