par Jean-Marc Riccini
 

Automne 1885. Santa Maria Sicchè.
Duminichellu hâte le pas. Que peut bien vouloir Marie-Félicité qui lui a instamment demandé de passer la voir ? Ils entretiennent une liaison depuis quelques temps déjà. Dans la pénombre d’une stretta derrière l’église, elle lui annonce qu’elle est enceinte.
Le courage n’étant, sans doute pas, pas une de ses principales qualités, la réponse de l’homme est cinglante : « tu aurais dû faire attention, que comptes-tu faire ?
Pour la jeune femme le mariage est la seule solution. En cette fin du XIXème siècle, sans cette alliance ce sera la honte pour la future mère et le déshonneur pour sa famille. Peu importe pour son compagnon qui lui suggère l’avortement. Ajouter le péché au péché, Marie-Félicité rejette la proposition.
Ainsi viendra au monde, dans la plus grande discrétion, Marthe. Xavière a assisté sa fille lors de l’accouchement. C’est elle aussi qui, ce matin- là, à l’aube, « pour faire taire l’outrage », déposera le panier dans lequel se trouve le nourrisson sur les marches de la demeure du maire du village d’Azilone. « Sacrifier un enfant pour sauver sa famille » !
Un an plus tard Marthe quitte l’orphelinat d’Ajaccio avec Marie-Dominique et Louis Antoine qui viennent de l’adopter. Dans la diligence qui les conduit à Guagnu ils font la connaissance de Fernand Rollin, fonctionnaire zélé de la République chargé de vérifier les listes électorales et recenser naissances et patrimoines.
J.P Nucci va nous livrer deux histoires : celles de Marthe et celle de Fernand. Deux vies, deux destins Avec pour cadre une Corse où la vie est dure et la misère présente. Cette misère qui amènera Louis-Antoine à s’expatrier et verra Marthe abandonnée une nouvelle fois.
Fernand poursuit sa mission d’administrateur. La République s’installe dans cette partie de la Corse où les idées indépendantistes sont toujours très vives. Il se heurte à susceptibilité de Hyacinthe, le maire du village. Il tombe sous le charme de Pauline, sa logeuse, mais trouve l’inimitié de Joachim, son frère, tiraillé entre sa possessivité et le bonheur de sa sœur.
Dans la piève « sorruinsù » la haine est tenace et la tradition y est sévèrement ancrée.
Jean-Pierre Nucci a ainsi tous les ingrédients propres à engendrer un drame « nustrale ». Des moments sombres mais quelques accents « pagnolesques » dans les relations qu’entretient Fernand avec le maire.
L’auteur évite d’entrer dans le quotidien « d’ a bastarda » en mettant en parallèle la vie du « pinzuttu » et nous fait découvrir l’âpreté de l’existence dans notre île à cette époque où les deux personnages connaîtront une trajectoire différente.

bastarda 4e couv

Après La Guardiola  et  Monteggiani , JP Nucci nous livre un roman agréable : à découvrir

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