De la Corse à la Grande-Bretagne en passant par les routes françaises, Maddalena Rodriguez-Antoniotti fait voyager sa narratrice au gré de ses rencontres en autostop. Et dresse le portrait d’une société et de ses réalités. Une ode à la liberté.
Par : François Berrettini
Histoires passagères, disons : « Histoires d’une passagère ». Une hippie féministe d’une vingtaine d’années, nourrie de la lecture de Rousseau, de Rimbaud et de Kerouac. Dans son F3 de la cité de Bas-Coudrais elle a reconstitué une petite communauté dont la sociabilité « empruntait pêle-mêle à Lao Tseu et Kropotkine, à Marx à Mao, à Hermann Hesse et à Herbert Marcuse ». Leur slogan : « Révolution et liberté ». Une communauté ivre de Léo Ferré, de Woodie Guthrie, de Bob Marley. Et entre deux prises de marijuana, de Jimmy Hendrix, de Leonard Cohen et de Bob Dylan.
Des flashes à la tonalité poétique
Dans son jean moulant, elle interpelle tous les automobilistes qui passent à portée de voix. Un paysan balourd dans une fourgonnette grise, un conducteur tendre en qui elle croit reconnaître un frère. Un macho milanais tombeur de filles qui se voit déjà nu dans une crique, avec elle. Un camionneur costaud dans sa 4 L. Un Gallois gouailleur. Un aristocrate anglais « tout de gris vêtu, costume trois-pièces agrémenté d’une pochette de soie . Dans un visage creusé à la Beckett ses paupières tombantes laissaient passer de la bienveillance et comme de la bonté ». Un « Hercule de service » aux muscles durs et aux cheveux ras, au regard gris acier. Un homme bien sous tous rapports, au parler poli. Forcément, la gamme des véhicules, comme la galerie de portraits, est variée ; elle s’étend de la « bagnole pourrie », à une splendide Bentley d’un bleu sombre.
La sensibilité artistique de Maddalena Rodriguez-Antoniotti en tant que peintre et photographe lui inspire des flashes à la tonalité poétique : «[du côté de Ponte Leccia] Un rougeoiement s’attardait, lézarde sanglante dans l’outremer quasi nocturne ». « [dans le Pays de Galles] Un ciel dilaté sous les assauts du vent, la rencontre du soleil avec un rideau de pluie, une pleine lune sur les plateaux sans oublier les prés et les landes d’une langue qui résistait à la mainmise de l’anglais ».
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Mais dans ce récit, le choc que ressent le lecteur provient de l’irruption dans la prose généralement délicate de Maddalena Rodriguez-Antoniotti d’un vocabulaire cru qui traduit la brutalité du désir masculin.
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