L’anagramme est un jeu de la langue. Il consiste à mélanger les lettres d’un mot pour en former un nouveau. Anagrammes à la folie est un livre très réussi de Sylvain Tesson et de Jacques Perry-Salkow, le maître du genre, qui invite le lecteur à jouer avec le langage.
Par : Caroline Vialle
Quelle belle idée a eue Jacques Perry-Salkow de demander à Sylvain Tesson sa participation à une illustration écrite de ses Anagrammes à la folie ! Car c’est bien de cela qu’il s’agit, relier la phrase à son anagramme par un texte que l’on pourrait presque qualifier d’image tant l’écriture de Sylvain Tesson est précise, détaillée, vivante et toujours surprenante.
Déceler la magie des mots
La magie de l’écrivain-poète opère encore une fois ! Il nous conte avec un charme infini et une imagination brillante ce que chacun des titres contient dans son endroit autant que son envers. Tout y passe, l’histoire, ses grands hommes et ses hommes moins grands mais c’est malgré tout de ce qu’il connaît le mieux qu’il nous parle avec son infinie sensibilité. Les mots coulent de la phrase-mère à l’anagramme. Le charme opère afin d’unir les deux dans un seul et même bloc. A chaque fois l’anagramme guide le texte. Que seraient Voyager dans le Transsibérien, Les gargouilles de Notre-Dame de Paris ou encore Dans les forêts de Sibérie si Sylvain Tesson ne les reliait pas à leur anagramme en y mettant toute son âme et son ardeur à décrire ce qu’il a vécu et ressenti tout au long de sa vie jalonnée de grands espaces et de hautes contrées?
À lire aussi : Un été avec Rimbaud de Sylvain Tesson
Il n y a pas que la découverte d’un deuxième sens caché et la fluidité du verbe qui nous charment en prenant le livre en main.
Des illustrations qui dévoilent le coeur du monde
Les illustrations de Michel Pinosa en tonalité de noir, gris, beige, avec des touches rouge sang et lie-de-vin viennent ponctuer les pages épaisses et le papier glacé qui achève de donner au livre le caractère précieux qu’il mérite.
Quand il nous parle si fortement de L’âme des baleines qui lévitait en Limite estivale de la banquise ou de La transhumance des icebergs A ces berges charmantes du Nil, c’est bien parce que Sylvain Tesson a découvert depuis longtemps le sens caché du monde et de la terre qu’il peut nous faire passer autant d’émotions.
Briser le conformisme du langage
Nous fermons le livre totalement sous le charme de découvrir les multiples possibles de quelques mots jetés comme à l’improviste ; des mots reliés les uns aux autres par une traînée de poudre poétique. Et l’on se dit que la lecture a tenu toutes les promesses faites par Tesson:
L’anagramme est un frémissement; elle vient briser le conformisme des mots imprimés… pour crever le miroir de l’eau et adresser au ciel un baiser interdit.
Et de nous décrire la révélation de la Pietà par Michel-Ange :
Le sculpteur n’était que l’inventeur d’une forme précédant son travail.
Tout est, encore une fois, admirablement dit. « L’anagramme est une dame », « L’anagramme est un jeu » dit jacques Perry-Salkow, jeu auquel ces trois artistes se sont livrés pour notre plus grand bonheur.
Et de rajouter pour lui : L’anagramme est une passion.
En savoir plus
Sylvain Tesson, Jacques Perry-Salkow, Anagrammes à la folie, Paris, Pocket, 2019.
En savoir plus sur Musanostra
Subscribe to get the latest posts sent to your email.