par Javier Linbon
C’est avec plaisir que je prends place sur ce beau site, avec fierté . Mon choix : je conseille encore à mes amis de Musanostra la lecture de « jo confesso » roman catalan en France devenu Confiteor dans la bonne traduction de Ed. Railland, chez Actes Sud.
J’ai pris franchement plaisir à le lire après les 60 premières pages (je vous le fais à la louche, peut-être 62 ou 59 ) avant d’apprécier . Avant dur dur ! A la manière du Cosmoz de Claro, ce Confiteor de Jaume Cabré nous force à penser plus vite qu’à l’habitude, à huiler des mécanismes cérébraux parfois rouillés et à traverser le temps, les conventions stylistiques, les valeurs. Et je ne fais pas souvent ce type de sport ! Ca vous donne pas envie dit comme ça, alors je vous raconte : c’est l’histoire d’un homme prêt à sauter le pas, à mourir,
Adrià Ardevol pense et se souvient. Depuis sa naissance à Barcelone, sa jeunesse et la nécessité de fuir un destin parental (père qui le rend collectionneur, mère qui le rêve célèbre musicien virtuose sa vie entière défile, avec cohorte de traces des êtres, préoccupations et des lieux connus. Réminiscences dans ce qui paraît être une longue missive adressée à Sarah qui n’est plus là et qui devrait reconnaître quelques épisodes alors que le lecteur, pantelant, s’accroche dans ce kaléïdoscope où tout foisonne et se téléscope. Des ancrages pour Adrià, une médaille, un bout de tissu blanc et bleu, et un violon, par dessus tout, un Storioni, fait au moyen âge dans un bon et bel épicea, passé dans tant de mains au fil du temps. Mais qu’est-ce que le temps, cet arbitraire découpage ?
Au fil des phrases on passe d’une époque à une autre, la narration emprunte d’autres voix, les âges de la vie et des vies se superposent.
Oui, lecteur, tu vas parfois t’inquiéter ! Mais Cabré te guide, c’est un chef ! Respect, j’admire son érudition, sa force : riant il parle d’un certain nombre d’années pris pour l’écrire, je l’ai lu vite, son roman, en version originale en 2011, puis en français. Il faut dire que j’ai le temps et qu’à la fin quand tout se met en place j’ai eu un orgasme de lecteur. Quelqu’un a dit que ce roman met en place peu à peu ce qui deviendra à la fin une cathédrale, j’aime assez l’image. Un bémol , le titre français qui donne une impression de religiosité, de savoir suranné. Peut-être à cause du latin…Jo confesso, c’est direct, comme le livre,à la première personne souvent même si de temps en temps ça passe à d’autres pronoms.Se sentir seul comme on respire, d’autant qu’on sait qu’il n’existe pas, le Dieu des autres, « sans prêtre », attendant « la dame à la faux » supporter un ami perfide et fidèle, le Bernat auquel il confie son manuscrit, c’est lourd, sans doute ! Mais non, la dimension prise ici par cette intrigue et le plaisir qui en découle est hallucinante. Je conseille à ceux qui sont accrocheurs quand un livre ne se donne pas immédiatement, à ceux qui ont le temps, aux oisifs, aux égoïstes qui n’ont pas quelqu’un de proche à écouter. Autrement difficile à caser, attendez les vacances , parce que j’ai oublié de vous dire que ce bouquin là fait près de 800 pages ! Sur Jaume Cabré on doit savoir que c’est un écrivain énormissime, géantissime , avec tout plein de romans à son actif et qu’il faut le lire.
Réédition, première publication Musanostra novembre 2013
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