Dans Miss Jane, Brad Watson raconte la quête du bonheur entreprise par une femme atteinte d’une malformation. Un roman d’émancipation écrit dans une langue sensuelle et délicate.
Par : Marie-Pierre Poggi
Certains livres, longtemps après en avoir tourné les pages, vous accompagnent d’une douce nostalgie. Le roman Miss Jane de Brad Watson est de ceux-là.
Dès les premières lignes, on est séduit par l’attachante Jane. On la soutient dans ses difficultés. Avec elle on s’émerveille de ses découvertes et nos yeux s’éclairent au contact de cette héroïne si singulière.
En bref, Miss Jane c’est d’abord « la petite Jane » qui voit le jour en 1915, dans une petite ferme du Mississippi, entourée de ses parents et de sa sœur aînée, Grace.
Un handicap à surmonter
En dépit d’une malformation intime, Jane se construit tout de même une identité et composera sa vie avec sa différence. Sur ce point, les balbutiements du médecin de campagne qui répondit : « Tout ce que je peux vous dire, c’est que c’est une fille, qui ne s’est pas complètement développée ».
Confrontée à une mère froide et une sœur jalouse, le contexte familial de la fillette est peu propice à son épanouissement. Mais Jane s’adaptera et fera ainsi face à son destin. C’est guidée par sa curiosité et sa soif d’apprendre qu’elle surmontera les réticences de son entourage. Son observation des êtres, son lien à la nature, et son amour de la lecture lui permettront de découvrir et de comprendre ses émotions.
À l’adolescence, elle vivra ses premiers émois amoureux comme toutes les jeunes filles de son âge. « Elle avait été une fillette vive, mince et aux cheveux un peu trop fins, avec un visage doux et un bon caractère. Pourtant, aujourd’hui, elle avait grandi et était devenue une beauté émaciée aux yeux sombres. Elle se mouvait avec une sorte d’élégance naturelle, comme une feuille qui tombe avec grâce sous un souffle de vent. »
Un style plein de pudeur et de délicatesse
Le Docteur Thompson avec lequel elle tissera un lien quasi filial, deviendra au fil des années son confident. Celui-ci ne cessera d’interroger ses confrères. À vrai dire, il aura foi dans les progrès de la médecine pour un jour donner à « Janie » une solution à son handicap. « Elle le regarda et de ce fait, elle se dit que somme toute, il l’aimait sans doute d’une certaine façon. L’amour d’un être humain pour un autre, qui n’a besoin ni de classification ni de définition. ».
Ce roman est servi par une plume poétique et sensuelle. L’auteur aborde avec délicatesse et pudeur « la malformation » dont souffre Jane. Il n’en livre que peu de choses à l’image des balbutiements scientifiques de l’époque. On y découvre par ailleurs l’Amérique rurale que le XXe siècle commence à bouleverser.
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Ce livre est une jolie ballade aux saveurs douces amères. Le lecteur y accompagne Jane sur le chemin de la vie, au cœur de sa solitude. Et au moment de la quitter, on prend le temps de savourer les derniers instants d’une présence amie : « Elle se contentait d’être. Tout simplement Jane ».
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