Prix Orange du livre en Afrique 2019 et prix Goncourt des lycéens 2020, Les impatientes est un roman féministe et bouleversant, une pépite en hommage à des femmes dépouillées de leurs droits et dont le destin est trop vite scellé.

Par : Marie-France Bereni Canazzi

Dans un pays d’Afrique, deux très jeunes filles ; Ramla et Hindou, des demi-sœurs sont sur le point de partir vers leur nouvelle demeure ; car elles vont être mariées

L’une est très malheureuse. Parce qu’elle aimait un ami de son frère auquel elle avait été promise et par conséquent, refuse d’être aliénée par un mari qu’elle n’aime pas et qui, de surcroît, lui fait peur. Sa sœur, qui ne se sent pas prête et veut étudier, refuse également de se marier.

Les impatientes

Certes, elles ont essayé de parler de leur tristesse à leur mère, et aux autres. Mais toutes deux ne peuvent faire évoluer la décision de leur père, ni même obtenir sa compassion. Car en réalité, il n’est pas seul à décider. Il est agi par les siècles de coutumes. Mais aussi par ses frères et tout l’entourage. Puis les oncles ; tous, aussi déterminés à les soumettre, à les rendre patientes. Mot qui devient une insupportable litanie.

Une vie sans espoir

À vrai dire, auprès de leur père, les plaintes sont malvenues. La cause étant entendue, elles ne doivent pas faire de vague mais juste s’estimer heureuses d’être choisies. Il a élevé ses filles et s’en défait avec un certain soulagement. Car lorsqu’elles grandissent, il faut les transmettre à un autre homme , avant d’être embêté par leurs éventuels désirs et frasques. Il en a déjà marié d’autres et n’a pas à s’en plaindre. La famille y gagne en prestige et pouvoir.

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En somme, il ne prend même pas la peine d’écouter leurs réserves. Tout ce qu’il veut qu’elles sachent, c’est qu’elles doivent obéir à leur seigneur et maître ; leur mari, et cultiver la patience en toute circonstance. Et nous suivons ces enfants femmes chez leur époux. L’un déséquilibré et fantasque , l’autre riche et déjà bien vieux. Nous comprenons quelle vie elles auront, sans espoir, ou si vain.

Il faut supporter les humeurs. Parfois les coups, l’envie, la médisance. Tout cela est difficile. Que cela se joue ou pas dans une concession, dans une cage dorée. Car ce qui manque aux jeunes femmes, c’est la liberté et le respect. Rien ne leur est épargné. Tout comme au lecteur.

Les impatientes est un roman qui leur donne la parole. Et qui devient celle de toutes les fillettes mariées de force qui ne peuvent se défendre pour être respectées. Voire pour survivre. Car les premières épouses ne sont pas prêtes à abandonner leurs privilèges. La parole donnée à Safira, dans ce roman témoignage, montre combien la souffrance se partage quand on est fille sous certains cieux.

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