par Marie-France Bereni Canazzi
Tetsuo revient  après trois ans d’absence, c’est peu et c’est très long, bien des choses ont changé ; d’autant qu’il s’est suicidé, ce qu’il ignore au début, et que sa réapparition ne règle pas la question du pourquoi ! A ce moment-là au Japon des cas similaires défraient la chronique, avec les soucis de réinsertion que l’on imagine.

Il n’a plus le souvenir des derniers moments d’avant sa mort mais ne peut croire s’être rendu coupable d’un tel acte : il n’aurait pu abandonner ainsi sa femme Chika et son fils Riku âgé d’à peine un an. En plus au travail tout se passait relativement bien, sa dernière idée, la bière qui se boit à la canette devenue verre grâce à une ouverture complète, promettait un franc succès…
Il repense juste à quelques tensions avec le gardien de son entreprise à cause des coups que celui-ci avait donnés à un pigeon. A-t-il été tué pour si peu ? La philosophie de cet homme mouche comme il se définit a-t-elle déstabilisé Tetsuo ?
Tetsuo veut comprendre pourquoi il aurait pu sauter du haut toit de l’immeuble de sa société et interroge son médecin, le légiste, le personnel de son entreprise. Son ordinateur lui en apprend un peu plus, les divers témoignages le confortent dans l’idée qu’il ne s’est pas tué, mais qu’on l’a tué ! Il voulait vivre !
Il rencontre d’autres suicidés revenus à la vie et nous, lecteurs, on admet cela sans problème, tellement le fantastique est présent et nécessaire même à cette réflexion sur le suicide, sur les motivations du passage à l’acte et les effets que cela a sur les membres de la famille. Il rencontre également un psychiatre et ne cesse d’avancer vers une meilleure connaissance des mécanismes qui l’ont mû.
Une enquête, assez sereine, menée pas à pas, policière et psychologique ; on n’a pas vraiment envie de tourner les pages pour en savoir vite davantage : des longueurs parfois, des passages attendus sur les plats préparés au foyer, sur le monde professionnel, les silences et la réserve de sa femme. Mais ceux qui lisent la littérature japonaise apprécieront justement cette plongée dans un passé récent, celui d’un homme d’aujourd’hui, qui se livre finalement, par touches, en démêlant les fils de sa propre complexité, à l’autopsie de sa société, le Japon d’aujourd’hui. La fiction ici interroge sur le drame de ceux qui partent plus tôt et de leur propre gré, sur  la violence qu’ils ont subie et sur celle que subissent, forcément, ceux qui leur survivent.

 
Paru au Japon en 2012, en France en 2017 ( !)
 
 


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